Arrivé à Ceuta
Mercredi 8 Décembre
Encore tout étourdis par la valse des plages et lagons de Nouvelle
Calédonie dans la tête, nous nous envolons de bon matin pour la Nouvelle
Zélande. Le vol se passe bien même si on a difficilement encaissé que tout se
déroule en anglais y compris les films alors que la compagnie dessert une
destination française. Les formalités se passent rapidement mais malgré tous
mes efforts je ne parviens pas à sauver mes chapeaux en palme tressée
d'Ouvéa. Il ne fait que 20 degrés et le ciel est très nuageux. Comme on n'a
rien prévu pour notre séjour ici, on se sert de l'aéroport comme base de
préparatifs. Nous apprécions les moyens mis à disposition des voyageurs pour
contacter hôtels, loueurs de voitures et autres véhicules. Notre principal
objectif est de trouver un petit fourgon dans lequel on puisse camper, appelé
ici campervan. La tâche est ardue car on est en haute saison et les tarifs
s'envolent et de toute façon, il n'y en a plus de disponibles. Au bout d'une
dizaine de coup de fils on finit par en trouver un à un prix raisonnable pour
demain. Encore une bataille à livrer pour trouver un lieu pour passer la nuit
puis on atterrit dans un motel très moyen. L'heure du diner nous confirme sans
doute possible qu'on a bien retrouvé une terre anglo-saxonne. Ah que la
Nouvelle Calédonie est loin déjà !
Jeudi 9 décembre
Nous prenons possession de notre combi. Ca nous change du Totoy. D'autant
plus que le volant et le levier de vitesses changent de côté. Ca fait des mois
qu'on roule à gauche mais avec le volant à gauche. David met un peu de temps
pour s'y retrouver au début mais s'adapte très vite. Nous nous arrêtons
au premier supermarché pour faire les courses. Le centre commercial est en
pleine effervescence pour cause d'achats de fin d'année. Le ravitaillement
effectué, nous filons vers le nord d'Auckland à travers la circulation dense.
Petit à petit nous nous éloignons de la capitale, la route ne cesse de
serpenter dans la montagne.
Nous arrivons à Waimera où nous attend un super complexe thermal qui
utilise les sources d'eau chaude qui proviennent de plus de 1500 mètres de
profondeur. Mais en fait cela est plutôt fait pour y rester la journée alors
nous poursuivons notre chemin. La petite route s'insinue au coeur des collines
couvertes de vignobles. La campagne agréable cède très vite la place à une
frange côtière où nous attend le petit port de Leigh.

Perché sur de beaux promontoires, la petite bourgade de 450 âmes, surplombe
un joli port, dans lequel se reposent les bateaux de pêche bien à l'abri des
assauts sauvages du large. C'est aussi la porte d'entrée de Goat Islang, île
de la Chèvre, sanctuaire marin réputé pour sa faune exceptionnelle, tout
particulièrement ses dauphins. Mais vu la température ambiante, nous ne sommes
pas trop motivés pour faire de la plongée. Nous nous contentons d'observer les
pêcheurs qui viennent d'arriver et qui déchargent leur butin.
Nous poursuivons notre chemin en longeant la côte découpée, de plus en
plus assailli par le vent du large. La route s'est transformée en piste de
gravier qui escalade les montagnes nous offrant de beaux panoramas lorsque les
nuages acceptent de laisser passer les rayons du soleil. Nous achevons
notre périple de la journée à Mangawhai Heads. Là encore, une falaise domine
une immense plage balayée par les vents, rendez-vous très prisé des surfeurs.
La mer s'avance à l'intérieur des terres par une sorte de bras qui traverse
une zone sableuse. Nous sommes pétrifiés par le froid et le vent qui nous
glace les os. L'endroit doit vraiment être fantastique dans d'autres conditions
météo. Pour l'instant, nous nous sommes réfugiés dans notre campervan,observant,
bien au chaud, les tribulations de trois jeunes surfeurs emportés par leur
passion. Nous y passons une nuit plutôt ventée.
Vendredi 10 Décembre

Le soleil est de la partie, du moins pour le moment. Nous en profitons pour
explorer la plage sous un ciel lumineux. Il n'y a pas énormément de monde mais
c'est quand même animé. Le spectacle est autant dans l'eau avec les surfeurs
à l'affût de la vague, que sur la plage où les joggers s'adonnent à leur
passion tandis que les secouristes avec leur maillot rouge inratable s'entrainent
à leurs manoeuvres.

Les nuages commencent à pointer nous motivant pour continuer notre route.
Nous arrivons en fin de matinée à Bay of Islands, baie magnifique parsemée
d'une multitude de petites îles. C'est l'endroit propice pour les amateurs de
sports nautiques ou de nature marine et sous-marine. C'est forcément très
touristiques, d'autant plus en cette période de grandes vacances scolaires.
Nous nous renseignons sur les activités possibles, avec un attrait particulier
pour l'une d'entre elles : la possibilité de nager avec des dauphins. Mais mon
niveau de natation, c'est à dire aucun, l'obligation d'enfiler une combinaison
à cause de la température peu élevée de l'eau, et d'autres joyeusetés du
même style, viennent à bout de notre timide motivation. On tentera
l'expérience sous des cieux plus cléments.
Le site de Bay of Islands représente aussi un haut lieu de l'histoire de la
Nouvele Zélande car c'est le premier point de peuplement européen du pays et
par la suite de sa colonisation. A deux pas de ces merveilleux paysages se
trouve la maison de Waitangi dans laquelle fût signé le traité du même nom
en 1840 qui scella la collaboration entre les tribus maoris et le gouvernement
anglais. Un musée est dédié à cette période, retraçant le mode de vie des
autochtones de l'époque et l'atmosphère de Far West qui régnait en ces lieux.
Les nombreuses richesses de la région attiraient de multiples convoitises de la
part des anglais, hollandais et français et tout autre pirate ou aventurier de
l'époque. Waipu et ses alentours était un endroit mal famé, un port entouré
de bouges plus ou moins bien fréquentés attirant un ramassis de brigands. Des
commerces peu glorieux se sont montés avec les tribus entrainant guerre entre
clans, rebellions et autres faits d'armes empechant un bon développement
économique aux yeux des marchands. Ceci décida définitivement les autorités
des pays colonisateurs à "pacifier" la région, les anglais
emportèrent le morceaux.

Pour marquer le centenaire du traité, un whare maori, la maison de la
communauté, fut reconstitué. Les décorations intérieures sont magnifiques
avec des sculptures sur bois dans lesquelles s'expriment toute l'identité
maorie. Les espèces de totems représentent les différentes tribus. Chaque
artiste s'est évertué à sculpter la plus terrifiante, la plus expressive des
grimaces. Dehors, une reconstitution de pirogues de guerre de plus de 35 mètres
de long, richement sculptées elles aussi dans d'immenses troncs de kauris,
commémorent la découverte de la Nouvelle Zélande par les intrépides marins
polynésiens.
Nous revenons vers l'intérieur des terres. Nous traversons une région de
vergers de citronniers, d'orangers et de mandariniers. Ces derniers jours
la température a péniblement oscillé entre 18 et 20 degrés, on a du mal à
croire que la région est réputé pour son climat méditerranéen mais les
preuves sont là. Nous nous arrêtons au coeur de cette zone de cultures, à
Kérikéri qui possède un beau golf, endroit idéal pour notre jogging
hebdomadaire.
Samedi 11 Décembre

Nous commençons la journée par la visite de la petite bourgade où nous
avons passé la nuit. Nichée au creux d'une jolie rivière, Stone Store,
magasin de pierre, est le plus ancien bâtiment de pierre de la Nouvelle
Zélande. Construit dans les années 1835, ce magasin est rempli de biens et
marchandises commercialisées à l'époque. On y retrouve tous les objets de la
vie quotidienne de l'époque y compris mousquets et couvertures avec les prix.
C'est une visite très attrayante et sympathique. Le retour en arrière se
prolonge par la visite de la Mission juste à côté. On y retrouve les pièces
meublées comme avant, on peut ainsi de faire une petite idée de la façon dont
pouvaient vivre les gens deux siècles auparavant. Nous traversons la rivière
pour emprunter un petit sentier qui grimpe sur la colline d'en face. Au sommet,
on devine à peine, les vestiges d'une très ancienne forteresse élevée par un
grand chef guerrier il y a bien longtemps, mais le point de vue sur le centre
historique du petit village est très agréable.

Après ces visites historiques, nous prenons la direction du nord. La route toujours sinueuse
se transforme en piste de gravier jusqu'à la superbe Mataury Bay, mais
il fait vraiment trop froid pour espérer en profiter. Plus loin c'est Te Ngaire Bay qui dévoile ses
attraits. Ces endroits reculés et donc préservés sont l'idéal pour des
vacances nature. Nous poussons jusqú'à Whangaroa Harbour où nous trouvons un mini
port avec quelques bateaux de pêche à l'ancre, mais aucun signe de vie. Pas vraiment ce à quoi on
s'attendait pour une pause déjeuner. Alors on continue plus loin et on
s'arrête à Mangonui.

Ce joli petit village et son front de mer entièrement constitué de bâtiments historiques, baignent dans une
atmosphère de port de pêche absolue. La pause déjeuner avec la spécialité
incontournable du "fish and
chips" s'impose d'elle même. Ce plat, toujours aussi populaire est cette
fois-ci agrémenté de spécialités
locales comme coquilles St Jacques et grandes moules qui malheureusement pour
nous subissent le même traitement
que le poisson. Tout est trempé dans une pâte à beignet et frits dans l'huile
bouillante créant ainsi une couche extérieure très croustillante... et très
riche. Commettant probablement un sacrilège aux yeux des villageois mais un
acte de survie pour mon foie, je déshabille délicatement chaque friture pour
en extraire le mets délicat bien caché à l'intérieur.

Nous prenons ensuite la Nationale 2,
l'unique route qui mène à la pointe Nord. Les reliefs de moins en moins prononcés
semblent balayés en permanence par les vents. De moins en moins d'arbres et des arbustes
de plus en plus rabougris, puis de
temps en temps des dunes de sable surgissent des paysages désolés. La route se
transforme en piste de gravier et la montagne revient jusqu'au Cap Reinga à la
côte découpée. De part et d'autre de belles anses nichées au creux de la montagne
apportent un peu de douceur dans cet environnement déchiqueté.

Tout au bout de la pointe nord de la Nouvelle Zélande, la mer de Tasmanie houleuse rencontre l'océan Pacifique plus abrité.
Du phare battu par les vents, sous le ciel lourd de menace, très vite la
sensation d'être au bout du monde nous envahit même si on n'est pas seuls. Une
poignée de voyageurs ont eux aussi bravés la centaine de kilomètres de piste
pour goûter à ce sentiment incroyable. Nous regrettons fortement Totoy car il
nous aurait permis de repartir par la côte occidentale en roulant sur l'infinie
plage de sable de Ninety Miles Beach. Mais avec notre brave campervan, nous
faison demi-tour par la même piste laissant de côté les 90 kilomètres de plage ininterrompus de la côte ouest. Sous la
menace des nuages de plus en plus lourds nous repartons pour trouver ensuite un
endroit isolé pour bivouaquer sur cette fameuse plage de ninety miles beach, à Hukateré.
Dimanche 12 Décembre

Nous prenons notre petit déjeuner à l'intérieur du campervan, bien à
l'abri du vent qui balaie la plage. Dans la soirée et aussi en début de
matinée, quelques voitures sont passées et sont parties à l'assaut de la
plage interminable. On a même vu un gros camion tout terrain de dépannage,
partis au secours d'un véhicule en panne ou peut-être pris au piège que la
nature parfois réserve aux conducteurs téméraires. Après avoir pris un bon
bol d'air frais, c'est le moins qu'on puisse dire, nous remontons la piste pour
retrouver la route. Nous nous arrêtons vite après, au petit village d'Awanui,
pour visiter le royaume du kauri ancien. Le kauri, Agathis Australis pour les
intimes, est le plus grand et le plus célèbre des arbres originaires de
Nouvelle Zélande. Son ancêtre était déjà présent dans le pays il y a plus
de 100 millions d'années. La particularité de ce magasin - musée - atelier
est de proposer du bois travaillé à partir d'arbres ensevelis dans des marécages,
30000 à 50000 ans plus tôt, et déterrés intacts. Les énormes troncs
dégagés donnent lieu à des créations impressionnantes de la part de ces
artistes du bois. La pièce maitresse du lieu est un escalier sculpté d'un seul
tenant à l'intérieur d'un tronc qu'on a conservé pour mieux se rendre
compte.

Nous partons ensuite découvrir ces arbres étonnants dans la nature. Waipoua
Kauri Forest, située sur la côte ouest, est une énorme forêt qu'on a réussi
à sauver de l'exploitation industrielle du bois. Elle renferme plusieurs
exemplaires de ces arbres géants, certains ayant même un nom. C'est le
prétexte idéal pour de petites ballades au coeur de la superbe forêt. Nous
allons rendre visite à Te Matua Ngahere, "le père de la forêt",
qui, avec son tronc de plus de 5 mètres de diamètre, est le plus gros kauri de
Nouvelle Zélande et aurait environ 2 000 ans. Tout près, nous attendent the
Four Sisters, les quatre soeurs, dont les troncs gracieux s'élèvent vers le
ciel en enlaçant gracieusement leurs branches. Vient ensuite Tane-mahuta, qui
lui est réputé pour être le plus haut de tous les kauris avec ses 51 mètres
durement acquis au cours de ses 1200 à 2000 ans d'existence. Quand on côtoie
ces arbres, un sentiment étrange vous envahit. On a du mal à imaginer une si
grande longévité et on se surprend à rêver à tous ces évènements dont ils
ont été les contemporains. Ils dégagent une impression de puissance presque
palpable et pourtant, beaucoup d'entre eux sont tombés en quelques minutes sous
les scies ou tronçonneuses d'êtres humains. En tous cas, on comprend
facilement pourquoi ils sont si importants dans la culture maorie.

Nous repartons sur la route qui
serpente dans paysages bucoliques de campagne. On ne croise pas grand monde dès
qu'on sort des sentiers battus. A Kohukohu, nous prenons un ferry pour traverser
une des innombrables entrées de mer dans les terres. On se retrouvera ainsi à
Rawené en évitant un détour d'une centaine de kilomètres. De toute façon,
on est toujours partant pour prendre le ferry, c'est à lui seul un voyage dans
le voyage. Sur l'autre rive, nous rejoignons la côte à Hokianga une sorte de
Kiwi Outback, un bout du monde assez isolé. On vient ici pour goûter à la
tranquillité, à la vie simple dans un cadre magnifique. Tout au bout, Pakia
Hill, au sommet d'une colline, offre un panorama spectaculaire sur le petit port
abrité et les grandes dunes blondes à l'opposé. L'eau paisible du port
contraste avec les flots tumultueux de l'océan qui attendent l'embarcation dès
qu'elle franchit la limite invisible de la protection de la falaise.

Redescendant vers le sud, nous faisons un petit détour pour découvrir le
lac de Iwi Lake autour duquel beaucoup de familles se sont installées pour
passer les vacances. Puis Dargaville avec ses commerces et ses 4500 habitants
faisant presque figure de grande ville, nous donne la possibilité de nous
ravitailler facilement. Nous longeons ensuite la rivière Wairoa traversant une
immense région complètement plate, entièrement dédiée à'élevage.
Difficile de trouver un endroit pour dormir, tout est exploité, grillagé. La
pénombre gagne, nous finissons à Ruawai, sur un petit embarcadère donnant sur
le canal de la rivière. Nous y passons la nuit espérant ne pas être repéré
par les autorités.
Lundi 13 Décembre
Le ciel hésite toujours entre nuages et pluies. Pour l'instant ce n'est pas
grave, on va visiter à Matakohe le petit musée du kauri. Croyant y passer un
court moment, c'est en fait plusieurs heures que nous consacrons à cette
visite. De nombreuses scènes de travail et de vie sont reconstituées avec les
machines de la grande époque de l'exploitation forestière de ces géants. Des photos extraordinaires
rendent compte de ce travail de titan dans des
conditions démentes. Incroyable de voir ce que les hommes et les bêtes ont
été capables d'endurer pour acheminer les troncs des kauris, très recherchés
dans la construction maritime, alors que les machines n'existaient pas encore.
On a l'impression que tous les éléments étaient réunis contre eux, un relief
accidenté, parfois des zones de marécages à traverser, un climat rigoureux et
plutôt humide, insensé.
Le plus génial, c'est une ancienne scierie entièrement reconstituée et en
action qui permet de s'imprégner de la difficulté du travail même après
l'apparition de la mécanisation. Bref, un musée très riche, très pédagogique et très
intéressant.

Nous continuons sur la côte ouest en traversant les magnifiques paysages de
la petite chaine de montagne Waitakere Ranges. Les pentes des collines sont
couvertes de la forêt dense originelle de la Nouvelle Zélande et plus
particulièrement de la plante emblématique du pays : la fougère arborescente.
La lisière des bois est occupée par des villages résidentiels dotés souvent
de belles maisons contemporaines en bois. Les vues sur la baie d'Auckland sont
magnifiques surtout lorsque le soleil se décide enfin à sortir. Nous faisons
un détour vers la côte en empruntant une petite route sinueuse et tourmentée.
Nous descendons assez raidement une montagne pour atterrir à
Muriwai Beach.

La station balnéaire est très agréable, ça respire la douceur de vivre.
L'endroit est connu pour sa colonie de fous installée récemment et qui
manifestement se plait beaucoup. Un sentier agréable arpente la falaise et
permet de s'offrir de beaux panoramas sur l'océan. En haut du promontoire le
plus en valeur, nous avons une vue imprenable sur la colonie d'oiseaux. Ce qui
surprend le plus est l'odeur et le vacarme qui s'échappent de cet endroit. On
passe un petit moment à observer les oiseaux, comment ils décollent ou ils
atterrissent sur ces bouts de roches où il reste si peu d'espace libre. Les
parades de séduction ou les bagarres vigoureuses sont d'autres tranches de vie
très intéressantes. Le plus rigolo c'est de voir tout ça sur le piton d'en
face perdu au milieu de l'eau. Pour une fois où il fait soleil, malgré le vent
qui a forci depuis notre arrivée, nous nous promenons comme beaucoup d'autres
sur l'immense plage de sable noir, découvrant encore de nouveaux trésors comme
ces extraordinaires oursins multi colores. Un nombre impressionnant de surfeurs
tentent leur chance malgré la fraicheur de l'eau. Un semblant d'été nous
envahit, on se laisse aller à penser qu'il est enfin arrivé !
Nous repartons à l'assaut de la montagne et de sa route en lacets pour
redescendre quelques versants plus loin. Sur le plateau la vue sur notre
prochaine destination est saisissante. Une large baie sur laquelle viennent
s'écraser les lourdes vagues de l'océan est coupée en deux par un énorme pic
rocheux appelé la tête de lion. Quand nous arrivons en bas, le vent a
tellement forci que nous sommes totalement transi de froid dès que nous mettons
le nez dehors. On s'installe dans le seul camping pas terrible et nous
réfugions comme tous les soirs dans notre petit campervan douillet.
Mardi 14 Décembre
Malgré tous nos espoirs, l'éclaircie éclatante de la veille n'a pas duré.
Alors après un petit tour a jauger la possibilité d'escalader la tête de lion
nous abandonnons faute d'une motivation suffisante pour affronter l'eau glacée
qu'il faut traverser pour parvenir au pied du géant. Nous jetons notre dévolue
sur la plage de Karékaré, encore plus recluse que celle de Piha, qui a servi
de décor pour le film la leçon de piano de la réalisatrice néo zélandaise
Jane Campion. Nous rejoignons ensuite la route principale pour traverser
l'immense et très agitée Auckland de part et d'autre. Nous nous dirigeons avec
hàte vers Hamilton car aujourd'hui est un grand jour pour nous. Nous devons
retrouver Vicky, notre amie voyageuse anglaise rencontrée en Angola avec qui
nous avons partagé bien des pistes pendant plus d'un mois. Par les hasards de
l'existence, nous nous retrouvons à des milliers de kilomètres de là, elle au
travail, nous toujours en vadrouille. Les paysages au bord de la rivière
Waikato se sont complètement aplanis laissant le champ large aux fermes
laitières. On voit défiler des multitudes de troupeaux de vaches et nous qui
croyions que la Nouvelle Zélande était le pays des moutons, c'était sans
compter sur l'omniprésence de ces placides bovins.

Justement, nous retrouvons notre amie en pleine traite des vaches. Bien
qu'ayant grandi dans une ferme, j'ai du mal à m'y reconnaitre.
Incontestablement, l'ère industrielle est passée par là : 550 vaches à
traire en deux heures ! L'installation est impressionnante. Une énorme
barrière presse peu à peu le troupeau de laitières vers un plateau tournant.
La vache s'y enfourne, son pis est automatiquement désinfecté. La trayeuse
automatique est installée manuellement. 7 minutes plus tard, une fois le tour
de manège terminé, la trayeuse tombe automatiquement libérant la vache de son
joug. Celle-ci recule pour se désengager du plateau et retrouve enfin sa
liberté jusqu'au lendemain matin où on remet ça. En deux fois 7 minutes
seulement, 550 vaches donnent chacune en moyenne 21 litres de lait chaque jour,
jusqu'à 27 litres au pic de la saison ! Quand on se rappelle toutes les fermes
qui ont défilé sous nos yeux depuis qu'on a retrouvé la campagne et qu'on
sait qu'ici, c'est une installation à peine au dessus de la moyenne, les
chiffres de production de lait qu'on imagine donnent le vertige.
Vicky nous parle ensuite de la partie du travail. Ici, le Smic est à 18000
NZ dollars par an soit 8,7 dollars de l'heure (environ 4,70 euros/h) pour 40 heures par semaine,
avec 11 jours
fériés et 3 semaines de congés. Elle travaille ici depuis juillet. Elle est
arrivée en pleine saison de la mise bas et a été mise à rude épreuve dès
le départ. Elle a ensuite enchainé avec son poste actuel. Bref, elle est
maintenant incollable sur l'exploitation de ses bestioles. Une fois l'impressionnante démonstration
terminée nous entrons à la maison de ses amis Gaynor et Colm pour passer une
excellente soirée à se raconter toutes nos histoires et la vie en Nouvelle
Zélande. Souvenirs, anecdotes et vins néo zélandais coulent à flot, la joie
des retrouvailles et la bonne humeur suivent naturellement !
Vicky n'a pas débarqué ici par hasard. Gaynor est une amie d'enfance avec
qui elle a fait ses études d'agronomie en Angleterre. Pour leur stage de fin
d'année, elles sont partis un été en Australie, et ont travaillé à un
moment dans une ferme ou Colm était manager. Ce qui devait arriver, arriva,
coup de foudre entre Colm et Gaynor qui au final, s'installent en Nouvelle
Zélande, pays d'origine de Colm. Ils nous expliquent qu'ici, c'est très facile
de s'installer et qu'avant de se décider pour l'hémisphère sud, ils ont
failli s'établir en France qui à l'époque proposait des aides pour les jeunes
exploitants agricoles. Vicky, après sa traversée de l'Afrique, voulait passer
un an en Nouvelle-Zélande pour découvrir de nouveaux horizons et bien sûr,
retrouver sa meilleure amie. Voilà comment, 6 mois après s'être quittés en
Namibie, on retrouve une tablée internationale. Et encore, le clou de la
soirée arrive quand Vicky nous présente Rickard, son petit ami qui vit ici et
qui est suisse allemand ! Le monde, village global, n'est pas un mythe. Du coup,
les possibilités pour sont avenir sont immenses : retour en Angleterre,
prolongation en Nouvelle Zélande, installation en Suisse, ou bien quelque part
ailleurs ! Elle a encore 6 mois pour se décider et compte bien en profiter au
maximum d'ici là.
Mercredi 15 décembre
La pluie est déjà là pour sceller nos aurevoirs avec Vicky. Nous savons
que nous nous reverrons, par contre aucune idée du lieu de nos prochaines
retrouvailles. Nous poursuivons notre route. Grâce à la connaissance de notre
amie sur le pays, nous avons défini notre futur itinéraire. Pour l'instant
nous faisons une bonne halte shopping à la ville voisine de Hamilton. Puis nous
partons sur Rotorua, la pluie s'est enfin arrêtée.

La forte odeur d'oeuf pourri qui flotte dans l'air nous annonce que nous
sommes arrivés à la "cité sulfureuse" comme on l'appelle ici.
Rotorua serait une ville comme une autre avec ses 75 000 habitants si elle
n'avait la plus forte activité géothermique du pays. Quelque soit l'endroit
que vous sillonné vous ne pourrez échappé aux fumerolles qui s'échappent
continuellement du sol toujours accompagnées de cette odeur âcre de soufre.
Situé en plein centre ville, le parc Kuirau que nous visitons est un bon moyen
de prendre contact avec les phénomènes étranges qui agitent cette terre. Sa
dernière crise éruptive remonte à la fin 2003. Enveloppés par une brume
étrange, on chemine parmi des bassins thermaux aux eaux d'une coloration
bizarre, des mares de boues bouillonnantes, des cratères effondrés crachant
sans cesse des vapeurs odorantes.

Nous quittons ces lieux envoûtés pour des alentours plus sereins et plus
respirables. Nous nous retrouvons dans une immense forêt, siège d'une très
ancienne éruption volcanique qui a sculpté les reliefs environnant et qui a
surtout donné naissance à de nombreux et superbes lacs. Nous partons
successivement à la découverte des lacs bleu puis du lac émeraude et enfin
nous faisons le tour du lac de Tarawera, agréable lieu de villégiature dans
lequel s'épanouissent de magnifiques maisons secondaires. Nous retournons sur
nos pas, près du lac bleu pour trouver un coin tranquille où passer la nuit.
Jeudi 16 décembre

Ces lieux si paisibles cachent une tragédie dont nous allons découvrir les
vestiges ce matin. Au milieu du 19ième siècle, la région était déjà très
fréquentée par les touristes qui venaient principalement pour les fameuses
terrasses minérales roses et blanches. Tout bascula le matin du 10 juin 1886
tout lorsque le volcan du Mont Tarawera, éteint depuis plus de 500 ans, se
réveilla brusquement lors d'une violente éruption. Tremblements de terres et
bruits sourds précédèrent le moment fatidique mais pas suffisamment pour que
la population se mette à l'abri. Le volcan cracha des boules de feu et expurgea
des cendres et des boues brûlantes pendant plusieurs heures d'affilée
ensevelissant trois villages maoris en faisant 153 victimes. Te Wairoa est l'un
de ces villages qui a été en partie exhumé lors de fouilles. Tout est resté
figé tel quel, représentant ainsi un témoignage important et émouvant sur
cette époque. Le village musée est aussi le cadre d'une agréable ballade le
long de chutes d'eau, au coeur d'une dense végétation. Le sentier débouche
ensuite sur le superbe lac de Tarawera sur lequel des croisières sont
organisées.

Nous enchainons ensuite avec le réserve géothermique de Te Whakarewarewa.
Cette attraction touristique combine les phénomènes thermiques avec la visite
culturelle du village maori. Nous évoluons parmi de nouveaux paysages plus ou
moins fumant. La star du site est un geyser. Pohutu érupte entre 10 à 20 fois
par jour pendant 5 à 10 minutes à une hauteur moyenne de 20 mètres. La foule
est nombreuse à attendre ce moment. Quant à nous, nous préférons nous
éloigner de cette agitation et bénéficier d'un beau panorama sur l'activité
de Pohutu depuis notre point de vue surélevé. Redescendant dans le village
toujours en activité, ce qui surprend le plus, ce sont les innombrables tuyaux
qui surgissent du sol pour laisser échapper la vapeur des entrailles de la
terre et empêcher que le sol ne se déforme trop. Même l'église et son
cimetière n'échappe pas à la règle.

Entièrement géré par un clan maori, ce parc donne l'occasion de mieux
prendre connaissance de leur culture notamment par le biais de danses
exécutées avec une conviction touchante. Bien sûr le court spectacle est
parfaitement rôdé et tout est minuté mais cela permet d'avoir un petit
aperçu de leur identité polynésienne. Nous restons sur notre faim mais nous
nous en doutions en venant dans un endroit incontournable mais si
commercial.

On continue dans la
série du parfait touriste avec le show de l'Agrodome sur les moutons 10 fois
plus nombreux que les habitants du pays. Bien
réglé à l'américaine, le spectacle expose les 19 races de moutons exploités
dans le pays en nous expliquant les différences entre chacune. C'est aussi
l'occasion de se rendre compte du travail des chiens de bergers et de la
performance exécutée quotidiennement par les tondeurs de moutons lorsque c'est
la saison. En tous cas, c'est sympa même si on est bien loin du fonctionnement d'une ferme.
Nous allons faire un petit tour à côté à l'Agrodome Adventure Park, qui
rassemble un échantillon d'activités à sensations fortes pour lesquelles la
Nouvelle Zélande s'est déclarée fer de lance. Parmi les différentes
possibilités nous passons un petit moment à regarder les adeptes du zorbing :
une sorte de grosse sphère de plastique transparente dans laquelle les
participants s'engouffre tout seul ou à deux. On leur balance un bon seau d'eau
froide puis on ferme le tout et on laisse la boule dévaller une pente. Ca n'a
pas l'air très impressionnant de l'extérieur mais les sensations sont surement
plus fortes vécues de l'intérieur. Ce n'est pas trop notre truc et de toute
façon, il fait trop froid pour se retrouver brassé et trempépar de l'eau bien
fraîche ! Et puis, comme toutes les activités de ce type, c'est cher. Le ciel
est toujours partagé entre pluie, nuages et vent. Nous revenons sur Rotorua, David fait un neuf trous tandis
que je travaille. On finit notre journée par un jogging sur le golf et sous le
crachin.
Vendredi 17 Décembre

Lever en fanfare pour être à 10H15 à Wai-o-tapu pour son geyser. Lady Knox
Geyser jaillit tous les jours à la même heure avec un petit coup de pouce.
Bien entendu, on n'est pas les seuls à vouloir assister à cette attraction. Il
règne une frénésie incroyable avec du monde qui court et qui roule dans tous
les sens pour ne pas rater cet évènement. Le jaillisement est déclenché par
l'ajout de lessive organique. Aujourd'hui il ne s'avère pas très
impressionnant même si cela représente toujours un moment spécial.

Par contre la découverte du reste du parc se révèle un étonnement
permanent. Tout d'abord, on nous remet un document en français nous expliquant
succinctement tous les phénomènes en jeu. Wai-o-tapu est la plus grande
réserve thermale de la région volcanique de Taupo. Elles est née des
agissements volcanique il y a plus de 150 000 ans alors que les activités
thermales sont apparues 13 000 ans avant notre ère. Une rivière traverse cette
zone mais aucun poisson ne peut y survivre à cause de la présence de nombreux
composants chimiques. Les cratères béants se succèdent teintés à chaque
fois par des couleurs différentes : le jaune pour le souffre, l'orange pour
l'antimoine, le vert pour l'arsenic, le violet pour le manganèse et encore bien
d'autres. De nombreuses formations plus étranges les unes que les autres
défilent : des terrasses colorées et formées comme d'énormes stalactites
horizontales, des piscines d'eau chaudes ou froides, des mares de boues
bouillonnantes et toujours les fumerolles qui s'échappent vers le ciel.
Champagne Pool est sans conteste la plus belle de ces inventions de la nature.
Ses contours orangés contrastes avec les eaux rouge brun du bord puis limpides
et frémissantes comme du champagne au coeur du bassin. A la fin de notre visite
nous sommes très heureux de notre découverte.

La ballade nous a creusé l'estomac, nous nous arrêtons un peu plus loin
pour un pique-nique au bord de la rivière. Nous poursuivons notre route vers le
lac Taupo en prenant garde d'être à4 heures aux rapides d'Aratiatia pour le
lâcher des eaux du barrage. L'ouverture des portes se fait progressivement et
du coup le lâcher ne nous impressionne pas par sa puissance. Par contre le
niveau d'eau monte beaucoup et plutôt rapidement. On récupère trois jeunes
auto-stoppers israéliens que nous amenons à Huka Falls de jolies chutes d'eau
qui ne perdent pas de leur charme malgré la grisaille. Mais nous renonçons
quand même à la marche vers le lac car il pleut.

Un peu plus loin, une éclaircie nous permet de profiter pleinement d'un
autre parc thermique " Craters of the moon". Apparue dans les années
50, cette zone porte bien son nom. On se croit plonger au coeur de paysages
lunaires. On déambule parmi des sols fumants, parsemés de crevasses et
cratères béants d'où s'élèvent fumées et fumerolles. Ce qui surprend
encore, ce sont les couleurs invraisemblables que l'on découvre quand on peut
s'approcher de ces formations étranges.

On profite ensuite des installations urbaines de Taupo pour faire la mise à jour du site web. Le
temps est toujours aussi clément alors nous poursuivons notre tour du lac
jusqu'à trouver un endroit tranquille pour bivouaquer. On passe la soirée avec
un clan de canards, sous la pluie.
Samedi 18 Décembre

Le rayon de soleil matinal nous laisse apprécier l'immensité du lac et ses
falaises impressionnantes qui ont dû être créées lors de l'explosion du
volcan qui a tout détruit sur l'île Nord mais qui a fait naitre ce lac de 600 km carrés
il y a plus de 26000 ans. Une autre éruption plus récente (181 AD) beaucoup moins
forte a quand même produit une colonne de 50 km de haut et des impacts sur le
ciel qui out été remarqué en Chine et même par les romains. Aujourd'hui, où
on contemple ses
paysages étonnants, le lac est réputé mondialement pour la pêche à la truite.
On va donc visiter un centre qui leurs est dédié où on en apprend plus sur la truite arc en
ciel qui peut faire jusqu'à 50cm à la taille adulte : de sacrés beaux morceaux
.

En s'éloignant, on ne peut malheureusement pas admirer le célèbre panorama des volcans enneigés
du Tongariro National Park qui se reflètent dans
le lac car l'horizon est complètement bouchée. C'est pourtant là que nous
allons car c'est l'occasion de grandes randonnées dans les montagnes. On voudrait bien y faire une petite marche,
mais quand on monte au
départ du célèbre sentier c'est carrément la neige qui tombe en rafale. Nous
faisons notre pause
déjeuner pour attendre que ça passe mais en vain. Alors on pousse jusqu à Whakapapa Village et sa
station de ski sous la neige. On ne résiste pas à l'appel d'une bonne petite bataille de boules de neige, écourtée de nouveau
par des averses de neige. On ne verra aucun sommet des célèbres volcans
alors ou passe notre chemin jusqu'à Taumarunui avec pause café gâteau pour se
remettre.

Puis
nous empruntons une "route de chèvres" qui s'enfonce dans les
montagnes volcaniques et la campagne profonde. Les paysages sont somptueux,
particulièrement quand on a la chance de s'offrir la chaine des volcans
enneigés en toile de fond. Pas vraiment de villages mais plutôt beaucoup de fermes de moutons qui décorent les collines pointues et
pour changer de temps en temps des vaches agrémentent le paysage. La route
devient piste de gravier le temps de traverser une jolie réserve naturelle à
la forêt luxuriante. L'alternance de soleil de nuages et de pluie souffle le
chaud et le froid sur notre moral. Nous arrivons à Stratford tardivement, sous la pluie.
Dimanche 19 Décembre

Nous faisons la grasse matinée car nous avons passé une mauvaise nuit à
cause du froid. Le mont Taranaki n'est pas bien luné car il ne souhaite pas se
montrer et se cache derrière les nuages. De temps en temps, on perçoit la base
enneigée majestueuse. Nous continuons à contourner le géant puis prenons la
route pour Dawson Falls où on retrouve Vicky à notre grande surprise et
satisfaction. Nous partons pour une petite marche dans la forêt moussue pour
voir les chutes. La végétation est plutôt humide et il faut rester vigilant
car on glisse facilement. Il y a de plus en plus de nuages autour du volcan
alors on se prend un bon thé chaud. Nous retournons à Stratford où on
mange dans un boui-boui vraiment très bizarre mais c'est le seul qu'on a
trouvé. Nos routes se séparent. Vicky part au Sud avec Rickard pour passer les
fêtes de fin d'année à faire du kayack au parc d'Abel Tasman sous le soleil
du moins, elle l'espère. Alors que nous poursuivons notre tour du volcan par la
côte Ouest en commençant par New Plymouth. Toutes les plages ici sont
réputées pour leur surf mais les conditions météo ne nous motivent pas plus
que ça pour les explorer. On fait quand même une exception pour le Cap Edgar,
le point le plus occidental de l'ile du Nord.

Dès qu'on s'éloigne un peu de la côte, on se retrouve cerné par des
milliers de fermes. L'heure du bivouac approchant on essaie de se rapprocher de
la mer. Mais chaque fois qu'on emprunte un chemin, on termine devant une
barrière qui cloture les champs, à quelques mètres à peine du rivage.
Incroyable. Tout est fait pour les vaches. La moindre parcelle de terre doit
servir de pâture au bétail. Les maisons sont entourées d'un minuscule jardin,
le maximum d'herbe est dédié aux ruminants, certaines broutent même sur les
bas côtés. Finalement, on arrive à trouver un bivouac au bout d'une demi douzaine de tentatives
Lundi 20 Décembre

Nous longeons la côte, croisant de nombreux camions laitiers jusqu'à
Wanganui où nous commençons à remonter la rivière du même nom. La route
retrécit au fur et à mesure que nous nous enfonçons dans les montagnes. Au
sommet d'une de ses montagnes pointues, la vue embrasse toute la vallée. La
rivière marron foncée contraste avec les pentes verdoyantes des flancs des
montagnes. Pendant longtemps, la rivière était l'objet d'un intense activité
car sa longue voie navigable était un des rares et facile point d'accès vers
la côte. On imagine les bateaux à vapeurs chargés de marchandises, remontant
le cours d'eau, créant des scènes d'un grand romantisme. Pour l'heure, la
rivière est désertée mais le panorama n'en reste pas moins magnifique.
L'activité est très réduite, de rare villages parsèment le parcours. A notre
grande surprise, nous apprenons l'existence d'un couvent établi par des
missionnaires français, autour de l'église de Saint Joseph. Nous y faisons une
petite halte pour y découvrir les conditions de vie très austères et
spartiates des rares soeurs qui occupent les lieux. La piste de gravier
débouche ensuite sur Pipiriki traditionnel point de départ des excursions en
canoé ou autre embarcation plus rapide sur la rivière. Nous quittons le cours
d'eau qui poursuit sa route vers le Whanganui national Park où il prend sa
source. La piste redevient route de bitume et nous progressons gentiment en nous
rapprochant de nouveau du Tangariro National Park et ses célèbres volcans.

Nous recherchons la route que nous a conseillé Vicky pour rejoindre Napier.
Juste après Turangarere, nous prenons une bifurcation qui nous transporte de
suite dans un autre monde. Nous retrouvons une petite route de montagne. Nous
évoluons de nouveau en altitude, parmi des montagnes verdoyantes avec en toile
de fond, les monts enneigés des volcans de Tangariro. Tout simplement
grandiose. Nous croisons très peu de monde. De rares fermes sont dispersés
parmi la verdure, on a vraiment l'impression d'être seuls au monde. Les moutons
disséminés sur les pâturages pentus sont les seules tâches de clarté sur
ces paysages où le vert foncé est omniprésent.

Nous entamons une descente dans la vallée parcourue par une rivière
sinueuse. Les paysages sont fabuleux malgré la lumière déclinante de la fin
de journée qui s'annonce. Ces scènes idylliques sont à la croisée de la
modernité puisqu'à plusieurs reprises nous assistons au rassemblement des
moutons avec des moyens qu'on aurait pas soupçonnés au vu de la qualité des
paysages. Les éleveurs déboulent dans la plaine juchés sur leur quad. Les
chiens sont logés à la même enseigne. S'ils ne s'arc-boutent pas à
l'arrière du véhicule, ils suivent dans la remorque tractée par l'engin. Les
nuées blanches de moutons dévalent les flancs pentus, rodés à cet étrange
rituel.

Puis la forêt apparait, nous engloutissant dans un océan de sapins. La
piste serpente parmi les monts boisés. De temps en temps des pans entiers de
montagnes dévoilent leur nudité, victimes de la coupe rase des forestiers,
créant rapidement une atmosphère de désolation. Nous recherchons un bivouac
mais aucun chemin accessible pour nous depuis la piste. Heureusement nous
finissons par tomber sur une espèce de clairière qui nous abritera pour la
nuit.
Mardi 21 Décembre
Nous poursuivons notre traversée de la forêt de montagne, nonchalamment.
Puis les reliefs s'adoucissent et nous débouchons sur une route qui nous
ramène à la civilisation. Les environs de Napier sont très fertiles et sont
réputés dans tous le pays pour sa culture et tout particulièrement pour ses
vignobles. Mais nous trouvons que c'est un peu trop de bonne heure pour
réveiller nos pupilles avec des dégustations de vins. Alors nous poussons
jusqu'à la ville qui offre une unité architecturale rare qu'il nous tarde de
découvrir.

Sise au bord d'une large baie, Napier fut victime d'un terrible tremblement
de terre en 1931 qui raya quasiment la ville de la carte. Le sol s'éleva par
endroit de plus de 2 mètres au dessus du niveau de la mer et Napier qui perdit
nombreux bâtiments, gagna néanmoins plus de 40 kilomètres carrés de surface.
Le centre ville totalement reconstruit à cette époque, représente une
véritable collection de bâtiments Art déco. On déambule dans les rues, le
nez en l'air, à l'affût des corniches richement ornées, des encadrement
peints aux couleurs pastel, des façades joliment décorées.
La ville, réputée pour son climat agréable, ne nous permet pas aujourd'hui
de vérifier cet adage. Le soleil n'est toujours pas au rendez-vous et ça fait
même la une des journaux. Apparemment, cela fait plus de 65 ans qu'on n'a pas
vu un été aussi pourri ce qui nous rassure un peu sur notre malchance
actuelle.

Nous continuons à explorer la côte. Ses abords découpés, offrent de beaux
panoramas quand la route permet de l'approcher. Nous parvenons à une crique
isolée, l'endroit idéal pour un bivouac. Nous nous installons pour passer la
nuit avec comme spectacle de soirée un beau soleil couchant.
Mercredi 22 Décembre

Nous partons en exploration de la péninsule au nord de Napier. La route
côtière s'enfonce souvent dans les terres faiblement peuplées, pour mieux
revenir sur des villages situées dans de belles baies. Le vent qui souffle fort
a fini par chasser les nuages. Les baies sont à chaque fois différentes,
parfois cernée par des falaises rocheuses ou de longues et interminables plages
de sable noir.

Puis nous approchons des paysages tourmentés d'East Cape, le point le plus
à l'est de l'île. Une petite communauté vit aux alentours. Le phare géant
chargé de surveiller les mers démontées se dresse fièrement en haut de sa
petite colline. Le vent est déchainé mais au moins on a du soleil ! Nous
n'osons pas déranger les gens qui habitent au pied de la colline pour leur
demander la permission de traverser leurs terres et rejoindre le phare alors
nous poursuivons un peu plus loin pour un pique-nique avec une vue dantesque sur
l'océan.

Nous avons passé la pointe et commençons notre "descente" de la
presqu'île. Nous croisons de temps en temps des vacanciers en quête de
tranquillité et de nature sauvage. Nous gardons l'oeil vissé sur la jauge
d'essence, il va falloir qu'on trouve rapidement une station sinon, on ne fait
pas le tour. Heureusement, notre voeu est rapidement exaucé. Dans ces contrées
reculées, la station est un lieu de vie incontournable. On retrouve l'ambiance
particulière des lieux similaires de l'Outback australien. Très vite, le
ciel se charge de gros nuages et grosses gouttes commencent à tomber, ça ne
pouvait pas durer. Et puis les éléments se déchainent. Dans un ciel quasiment
noir, des pluies diluviennes nous bouchent la vue en tambourinant violemment sur
la tôle de notre campervan. Cela ne nous empêche pas d'apprécier la beauté
de la pauvre chapelle de Raukokore isolée sur son promontoire. Mais il est de
plus en plus difficile de rouler sur la route côtière à flanc de falaise. Ca
en devient parfois stressant. Quand à Opotiki nous cloturons le tour de la
presqu'ile, nous retrouvons avec soulagement de meilleures conditions de
circulation même s'il pleut toujours. Comme il pleut encore, nous continuons à
rouler. Nous terminons notre morne fin d'après
midi à la station balnéaire très fréquentée de Maunganui.
Jeudi 23 Décembre
Nous ne sommes toujours pas mieux lotis au niveau de la météo. Le temps est
maussade, le plafond nuageux très bas. On distingue quand même la colline qui
donne son nom à la petite cité. On en profite pour faire la grasse matinée
pas trop quand même car on doit préparer nos affaires et nos sacs pour
rendre le campervan cet après-midi.
Comme à l'accoutumée nous longeons la côte autant que cela reste possible
mais les plages gardent leur mystérieuse beauté pour des jours plus
ensoleillés. Puis la route s'enfonce dans les campagnes toujours aussi
cultivées et exploitées pour l'élevage. Alors que nous nous approchons de la
capitale, le trafic s'intensifie et nous finissons dans les bouchons. Finalement
on arrive à la dernière limite à l'agence de location pour restituer notre
véhicule, pas de première jeunesse mais qui nous a jamais lâché. On se
trouve un hotel tout prés de l'aéroport car demain on se lève à l'aube pour
prendre notre avion pour Sydney.
Vendredi 24 Décembre
L'aube est arrivée, on s'est levé mais on a raté la navette d'une minute.
On est furax contre la direction de l'hôtel. On récupère un taxi tant bien
que mal et on stresse tout le long du trajet. On n'a plus qu'une envie, c'est
retrouver le sol australien et on l'espère le soleil qui va avec. Pourtant
jusqu'au dernier moment, la Nouvelle Zélande tente de nous retenir car nous
ignorions que nous devions nous acquitter de la taxe de l'aéroport. On doit
refaire la queue et on n'a plus un seul dollar. Heureusement pour nous,
l'administration néo-zélandaise accepte les cartes de crédit ! On embarque
dans l'avion, tout rentre dans l'ordre. Il nous tarde maintenant de retrouver
notre Totoy qui nous attend dans son garage depuis un mois maintenant. On
espère le retrouver en pleine forme car on a déjà pleins de projets dans la
tête.
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